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La louve et le prince, résumé.

Il s'était mis à tripoter le couteau qu'il fixait avec colère. Ses yeux étaient toujours d'un rouge luisant comme le sang. Je sentis le poids des années qui nous séparaient creuser entre nous le fossé par la faute duquel je trouverais la mort ce soir-là. Légère, j'avais cru jouer tandis que lui prenait au sérieux mes émois simplement provoqués par l'exotisme de ce monde que je découvrais avec des yeux d'enfant. J'observai ses traits parfaits, incapable d'imaginer qu'il ne fût pas conscient que nul ne pourrait prétendre exercer sur moi une quelconque attraction alors qu'il existait. Les immortels détenaient ce pouvoir : s'ils vous voulaient comme esclave, alors vous étiez tout simplement perdu.

• Comment as-tu la naïveté... Commençai-je donc, mais je ne pus terminer cette phrase.

Je couinai lorsqu'il me sauta à la gorge. Je voulus choir pour lui faire pitié, mais acculée au plan de travail, j'en étais incapable, ce qui m'arracha un sanglot sonore. Le regard animal, les lèvres retroussées, il grognait doucement, une main crispée sur mon cou qui pulsait, l'autre sur mon épaule pour m'empêcher de le fuir. Je sentis deux larmes couler le long de ma joue brûlante. Je laissai mon cœur parler, tant pis pour les conséquences :

• - Prince, par pitié, embrasse moi, bois mon amour si tu ne veux pas l'entendre, bois ma peur de te perdre, bois le respect que j'ai pour toi, bois l'admiration...

Je me dressai sur la pointe des pieds. Ma bouche n'était plus qu'à quelques millimètres de la sienne. Je refermai mes bras autour de lui. Mais il me cracha au visage :

• - Et tu as la faiblesse de supplier.

Il me poussa vers la porte et en larmes je me retournai pour la franchir. Je me réfugiai dans notre chambre où je me roulai en position fœtale pour y gémir en paix. Je pleurais en hurlant sans retenue, je venais de tout perdre, je pouvais bien me le permettre. Il me fallait... J'ouvris les baies vitrées et c'est en louve que je gagnai le box de Rubis. Il ne s'affola pas, maintenant il savait que j'étais une alliée. Je redevins moi-même pour ouvrir et refermer la porte, enlaçai son encolure blanche et pleurai contre sa peau. Il frotta mon dos nu de son museau. Cela dura une bonne heure, pour finir je le montai et me roulai dans la paille et m'endormis ainsi, épuisée d'avoir tant pleuré.

J'étais frigorifiée, la nuit était tombée. Le souvenir de ce qui s'était passé fit couler de nouvelles larmes sur mes joues roses. Après une caresse à l'animal et retournai à la chambre pour prendre un bain brûlant. Je m'y glissais quand des éclats de voix retentirent dans la maison. Je reconnus à grand peine la celle de Yule, par contre celle de Prince, tranchante comme une lame, était bien celle avec laquelle il m'avait annoncé que j'allais quitter ce monde dès qu'il aurait trouvé le moyen d'y procéder.

Ils se disputaient. A cause de moi, compris-je en entendant mon nom fréquemment. Cela dura une éternité. La porte de la chambre s'ouvrit à la volée et je me remis à trembler dans mon bain. C'était Prince et il avait trouvé le moyen de se débarrasser de moi, me persuadai-je dans un hoquet.

• - Tarah ? Fit Yule d'une voix chaleureuse. C'est moi... Par les Dieux, pesta-t-elle.

Et elle ressortit, mais je hurlai :

• -Je suis à la salle d'eau.

Simultanément elle avait commencé à hurler à Prince :

• -Tu l'as fait fuir, les Dieux seuls savent où... Les Dieux soient loués, termina-t-elle en m'entendant alors.

Elle fut près de la baignoire en un temps record et me prit dans ses bras en me caressant fébrilement les cheveux.

• - Pauvre petite chose, tu as une mine affreuse, sourit-elle tendrement.

• - Merci bien, ris-je à travers mes larmes.

• - Si tu veux je te laisse terminer, je t'attends sur ton lit.

Je fis oui de la tête même si je me fichais pas mal de la pudeur à cet instant. Qu'étais-je devenue..? Durant quelques minutes, je me laissai submerger par la peur que l'on me renvoie dans mon monde, là où personne ne m'attendait désormais, loin de tous ceux que j'avais appris à aimer comme une nouvelle famille. Si tout devait se terminer de la sorte, autant en finir rapidement, finis-je par me résonner. Je quittai donc le bain, les jambes flageolantes, dans un état second. Enveloppée dans ma grande serviette, je retrouvai l'elfe là où elle avait promis qu'elle allait m'attendre.

• - Alors reniflai-je, tu as un moyen de débarrasser ce monde de la louve indésirable ?

• - Ne dis pas de bêtises, sourit-elle affectueusement. Enfin sauf si c'est ce que tu veux mais...

• - Pour rien au monde, gémis-je.

Lorsque je réalisai que j'allais demeurer près de l'immortel, j'eus un coup au cœur, suivi d'un éclat de rire nerveux mais sonore. Je passai une main tremblante sur mon visage que je sentais livide. Il me vint alors l'idée que Prince ne serait peut-être jamais mien, s'il ne me pardonnait pas mon attitude des derniers jours.

La louve et le prince 91.