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Le destin des immortels - nouvelle publication
-Santé, sourit-il.
Elle trinqua, prête pour la bataille.
- C'était la dernière fois que tu voyais ce gamin, tout à l'heure, décréta-t-il sans autre forme de procès.
- Impossible, affirma-t-elle avant que la peur de l'avoir contré ne puisse la paralyser.
Car cette réaction tenait de l'instinct de survie. Malgré tout, elle lui conta toute l'histoire, d'une voix qu'elle durcit au maximum. Pourtant, on ne pouvait pas faire illusion face au chef d'une race aux sens aussi développés.
- Allez, Sofiane, même toi tu ne peux pas y être insensible, conclut-elle enfin.
- Je n'y suis pas insensible. Pourtant, je t'ordonne te t'arrêter là, Shali.
Il y avait des dizaines d'années que personne ne l'avait appelée par son surnom. Elle fronça les sourcils et la triste réalité s'imposa à elle. Tels des frères ennemis, elle et son chef de clan étaient pourtant beaucoup l'un pour l'autre. Personne sauf elle n'osait lui dire non, et personne sauf lui ne savait qui elle était réellement.
- Où est ton épouse ? Questionna-t-elle subitement.
Elle avait un mauvais pressentiment. L'espace autour d'elle ne présentait plus la petite odeur féminine.
- A laquelle en es-tu restée ? Répliqua-t-il en avalant une large rasade du punch qu'il n'avait pas entamé jusque-là.
Elle n'eut besoin d'y réfléchir qu'un instant. Elle retint une grimace. Elle n'aimait pas la femme de Sofiane.
- Une blonde, se rappela-t-elle.
Il hocha la tête en souriant à son verre, ce qu'elle considéra comme étant mauvais signe.
- Clarisse ? Questionna-t-il, curieux.
Elle se demanda à quoi il pouvait bien jouer. Elle haussa les épaules, songeant qu'elle le saurait bien assez tôt.
- Non... Ma... quelque chose, le reprit-elle.
- Marie-ange. Je lui ai dit un beau matin de sortir prendre l'air. Vue mon expression elle a compris qu'elle n'avait pas intérêt à revenir.
Shalimar s'était attendue à plus violent que cela. Le chef des immortels s'était maîtrisé. Il aurait pu se contenter de lui ôter la tête des épaules.
- Qu'est-ce qu'il s'est passé ? L'interrogea-t-elle, ravie qu'il soit d'humeur à discuter.
Cela signifiait peut-être qu'il négocierait avec elle, si elle se montrait suffisamment adroite.
- Elle m'ennuyait, expliqua-t-il froidement. Elles ont peur, ou bien quand elles n'ont pas peur, elles sont prétentieuses et avides de pouvoir. Vous avez du mal à comprendre que c'est moi qui commande, vous autres, conclut-il en s'absorbant dans la contemplation de son verre. Quant à Clarisse qui est la dernière en date, elle ne réclamait pas seulement du pouvoir, elle se l'octroyait. A la troisième fois je l'ai poussée dehors à midi, comme ça c'est réglé une bonne fois pour toutes.
Elle le reconnaissait mieux, dans une telle attitude. Il devait y avoir quelque-chose que cette Marie-ange avait touché chez lui, malgré tout, sinon elle aurait subi un sort similaire.
- Très bien, feinta-t-elle.
Elle hocha la tête pour marquer la fin de la trêve d'une manière amicale, puis se jeta à l'eau. Symbole de cette décision, elle échoua son verre sur la table. Il glissa un peu en face de la vampire, dans la direction de Sofiane, mais sans du tout l'atteindre.
- Comme je ne veux pas lâcher le garçon, comment fait-on, chef? Le questionna-t-elle.
Il prit quelques fractions de secondes pour lui répondre, probablement pas pour trouver ses mots, elle le savait trop rompu à l'art de gouverner. C'était davantage pour produire un effet plus dramatique, décida-t-elle en tâchant de garder malgré tout la tête froide.
- Tu commences à parler comme lui, fais attention, lui conseilla-t-il d'une voix douce-amère. Dans la bouche d'une femme plusieurs fois centenaire ce n'est pas très joli. Pour le reste tu n'as qu'à appeler l'établissement régulièrement ou l'observer de loin, qu'est-ce que j'en sais, moi, Shalimar?
Il parlait trop calmement. Elle allait avoir des ennuis. Elle se refusa à gesticuler sur son siège, adoptant une immobilité aussi parfaite qu'artificielle.
- Sofiane...