- Qui es-tu ?

La louve le dévisagea un instant, elle s’attendait à cette question mais il n’était pas aisé de se livrer.

- Je suis une femme.

- Ça je le savais depuis longtemps.

- C’est vrai ?!

Il opina un sourire aux lèvres.

- J’ai essayé de t’aider du mieux que j’ai pu à cacher cette identité. J’ai même désigné Arcadius comme cavalière ! Non mais tu imagines Arcadius en femme !

Un rire complice éclata dans la chambre.

- Tout le savoir faire de Dries n’y aurais rien changé, ça aurait été horrible !

Les secondes s’égrainèrent au fils de leur hilarité, quand le calme revient chacun était plus serein.

- Comment l’as tu découvert ?

- Le jour où tu es revenue blessée de l’enclos je t’ai porté dans ta chambre. Ton envoûtement de dissimulation ne dissimule tes charmes qu’à la vue et non au touché.

Cette déclaration eut l’effet escompté la jeune femme rougit violemment. Ainsi j’ai mes chances, songea-t-il, si elle était indifférente alors cela ne l’aurait pas gêné, du moins pas autant et pas ainsi. Si elle était indifférente j’aurais dû numéroter mes abatis car elle m’aurait égorgé !

- C’est un accident je te rassure et depuis je suis resté très gentlemen, promis.

- J’espère bien !

- Ceci ne répond pas à ma question.

- Je suis une louve.

- Je sais mais encore une fois cela ne m’éclaire pas, les garous n’ont pas le pouvoir de lier les âmes.

- Soit, je veux bien te répondre mais après tu devras toi aussi t’expliquer.

- Cela me parait juste.

- Je suis la gardienne de cette terre.

- Pardon? Je ne connais pas cette créature.

- Il était une fois six terres toutes reliées les une aux autres. Chacune prospéraient se nourrissant des bienfaits des autres et dans une réelle harmonie elles se développaient. Cela dura des siècles, tellement longtemps que personne n’osait imaginer qu’il aurait pu un jour en être autrement, mais voila chaque paradis à une fin et celui-ci chuta par la main de l’Homme. Les êtres sans magie se révoltèrent, jaloux des richesses de leurs confrères, une terrible guerre se déclencha soudain et la magie noire fut relâchée. Très vite elle se répandit de monde en monde entraînant les populations dans le chaos. Au début nous pensions que nous battre serait suffisant pour sauver nos modes de vie mais les années défilèrent emportant nos illusions. Mes sœurs et moi nous décidâmes de nous réunir sur Terre I, la Terre originaire, la nuit passa et les étoiles nous apportèrent qu’une seule solution, mais c’était une solution définitive, il fallait détruire les liens qui unissaient les mondes.

- Pourquoi ? Fit le night sincèrement étonné.

- La guerre faisait rage depuis des années certaines planètes étaient épuisées, elles n’avaient plus la force de supporter autant de haine. Leurs populations étaient décimées, leur nature saccagée, leurs villes détruites et pourtant la guerre continuait. Elle perdurait parce que les armées alimentées par les autres planètes ne cessaient de se déverser dans ses flans, nous croyions pouvoir encore les sauver mais pour cela il fallait arrêter les passages et cantonner les belliqueux à quelques terres seulement. Au matin nous sommes allées trouver les Dieux pour leur expliquer notre décision. Abbal approuva et nous érigeâmes les frontières. Conscientes du mal que nous faisions nous décidâmes mes sœurs et moi de nous se séparer, chacune devait veiller sur la planète qui lui était dévolue. Nous déviâmes les gardiennes.

Les crocs de la justice 132