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- Impossible, affirma-t-il posément. J'ai... un père et une petite amie que je ne veux pas quitter.
C'était probablement à cause du changement qu'il avait subi, mais il se sentait sûr de lui. Ils ne pourraient le forcer à rien.
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- Tu seras libre de les voir, expliqua Julia. Mais nous voulons tous ceux de notre espèce que nous avons repérés ici, pour que le contrôle de tous sur chacun puisse fonctionner. Tu as une nouvelle force, dont tu risques de vouloir abuser. Si tu nous faisais repérer c'est l'ensemble du groupe qui serait menacé.
Sloan trouva cela logique. Il comprenait aussi qu'ils considèrent ne pas être responsables de ceux dont ils ne connaissaient pas l'existence, car leur discrétion signifiait qu'ils étaient inoffensifs, sinon les médias auraient dénoncé leurs exactions. Toutefois ils semblaient réellement vouloir l'enfermer, lui. Il devait d'abord s'assurer que ce ne serait pas le cas. Il devinait que les empereurs ne seraient pas dupes, s'il tentait de les assurer de sa nature pacifiste. Il sentait que leur sixième sens l'avait percé à jour. C'est alors que toute sagesse quitta son esprit, qui brutalement, se sentit pris au piège.
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- Vous ne me retiendrez pas contre ma volonté, grogna-t-il en se levant.
Une atroce douleur lui vrilla le crâne, aussi vérifia-t-il fébrilement de quelle plaie cela provenait-il. Mais les magiciens avaient visiblement usé d'un don surnaturel pour la lui infliger. A présent sa vue commençait tout juste à se stabiliser.
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- Refuse et vous serez en danger, tes proches et toi, prévint l'empereur. Ils sont deux, et nous une centaine, or nous savons où ils habitent. Cela ne nous plairait pas de te garder prisonnier, Sloan, rappelle-toi que si tu acceptes de t'intégrer à la meute, tu pourras rendre visite à tes proches quand tu veux, à la condition d'être avec les nôtres à la tombée de la nuit.
Un long moment défila, tandis qu'ils laissaient la douleur se dissiper suffisamment. Ensuite, Sloan rouvrit les yeux, se redressa, prit une profonde inspiration et les détailla tous deux.
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- Pourquoi à la tombée de la nuit ? Grogna-t-il.
Rien ne lui interdisait de croire qu'il ne serait en pleine possession des forces dont il avait fait la démonstration qu'après le crépuscule.
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- C'est là que les lycanthropes sont les plus forts, et les humains, les plus vulnérables, l'informa l'impératrice. Écoute, ce n'est pas un effort énorme que nous te demandons, tu peux voir les tiens de l'aube au crépuscule, moment où tu dois être en ces murs ou avec la meute. Si tu désobéis ta vie et celle de ceux que tu auras fréquentés en ton absence seront en sursis.
Il envisagea de se relever pour partir sur-le-champ. Une vague réminiscence de la douleur de l'instant précédent l'en dissuada. Il pensa aussi à les attaquer. Mais le résultat serait le même. Une lumière apparut au cœur de ses pensées dépassées.
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- Je peux aller voir Kaileen, maintenant ?
Il se demanda jusqu'à quel point les magiciens avaient influencé le cours de ses idées. Mais il lui apparut que s'ils étaient puissants à de point, ils auraient fait en sorte qu'il souhaite rester en ces murs. A moins qu'ils se révèlent plus fins psychologues que cela. Un frisson le secoua lorsqu'il se demanda s'ils maîtrisaient par la pensée chaque âme qui peuplait cet immeuble.
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- Oui, mais n'oublie pas ce que nous venons de te dire, avertit l'empereur. Donne-moi ton numéro de téléphone.
Il donna un faux numéro, en se disant vaguement que cela constituerait un test. Mais évidemment Louis le rappela dans la foulée, ce qui mit à jour son mensonge. Le lycanthrope échangea quelques mots courtois avec l'inconnu qui avait décroché et assuré ne pas connaître Sloan. Celui-ci aurait pu trouver d'autres mensonges, mais il abandonna. Il leur donna son numéro et il prit les leur.
Il sortit donc de la pièce, puisqu'il devait aller voir la rouquine. Au lieu de cela, il sortit de l'immeuble. Avant de venir, il avait repéré des lignes de transports en commun. C'était cela, droite, gauche, et il était à l'arrêt.
Pendant le trajet, il se dit que les empereurs étant magiciens, il était inutile de fuir ou de leur cacher des choses. Même s'ils faisaient semblant de requérir sa franchise, en réalité, c'était pure politesse. Ils auraient toujours une longueur d'avance sur lui. Ils savaient même probablement où il était à cet instant précis.
Une heure de bouchons plus tard il déboucha de fort mauvaise humeur dans l'allée, chez lui. Il ouvrit lentement la porte d'entrée, au cas où quelqu'un se trouverait de l'autre côté, pour qu'il ne soit pas brûlé par les rayons du soleil couchant. En entrant il inspira un bon coup, sa gorge se desserra. Les vampires se tenaient là-bas, au bar, ils traînaient devant le petit déjeuner. Il se sentit immédiatement en lieu sûr. Il avait du mal à croire que quelques jours auparavant, c'est lui qui les avait sauvés.
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- Déjà, s'émerveilla Shalimar, je n'ai presque pas eu le temps de m'inquiéter.
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- C'est maintenant que tu vas devoir le faire, sourit tristement Sloan.